Il y a un endroit dans lequel tout se rejoint, c’est le cerveau de nos concepteurs. Mobiliser des champs de réflexion divers, les faire s’interpénétrer et en faire surgir de nouvelles idées, c’est le modèle créatif qui nous aide dans les moments où nous ne voyons plus comment surpasser les problèmes.
Réfléchissons « hors de la boite ».
La boite c’est ce dans quoi nous nous enfermons. C’est bien pratique, c’est un conteneur qui permet de transporter plein de choses.
Les marques font plein de boites, les « box » des FAI, les « box » déjeuner, les « box » cadeau, les « box » beauté, les « box » dans le Cloud (c’est bizarre de mettre des boites dans des nuages, non?), les box pour les chevaux, etc.
La délimitation physique de la forme « boite » nous rassure en nous faisant penser que tout est contenu à l’intérieur, même si elle est opaque. Le fait de ne pas savoir exactement ce qu’il y a à l’intérieur s’avère parfois déceptif à l’ouverture, comme un cadeau qui ne tient pas ses promesses.
Dans l’innovation comme en musique, nous pouvons sortir « hors de la boite ». En matière d’organisation de l’information, la première des boites et celle qui nous enferme dans une pensée linéaire et stéréotypée. Celle que nous retrouvons régulièrement dans nos projets et ce que j’appelle la boite « fonctionnelle » et qui ressort souvent dans les cahiers des charges.
Celui-ci fixe un objectif et modèlise les moyens et actions proposées par un système applicatif. Pour se faire il est pensé par rapport à un modèle qui est proposé par le système: par exemple, j’ai besoin de donner des informations chiffrées à mes utilisateurs, l’outil produira des graphiques, mon utilisateur rentrera donc dans cet outil par une entrée « statistiques et graphiques ». Dans le cas d’une application « métier » ou dans le cas d’une application « grand public », la navigation des utilisateurs se révèlera différente.
Pour « casser » la boite fonctionnelle, notre guide sera la volonté de donner aux utilisateurs ce qu’ils veulent. Au final, vous saurez que vous avez obtenu leur assentiment, lorsqu’ils vous auront dit « merci ». Notre pointe de départ « pour quelles raisons mon consommateur/utilisateur me dira merci? ».
« Merci » : une heuristique pour guider et évaluer le design.
L’innovation se présente comme une solution à un problème qui n’avait jamais été adressé ou comme une manière d’adresser ce problème qui n’avait jamais été mise en oeuvre. Dans un cas, la solution est le déclencheur du « remerciement », dans l’autre c’est sa mise en oeuvre. Dans les deux cas, le designer s’inquiète de cette mise en oeuvre: une solution mal conçue manquerait son objectif.
Le « merci » est ce que vous devez rechercher et explorer dans la première phase de votre réflexion sur l’innovation. Cela correspond totalement à la phase « exploratoire » du design, soit en demandant explicitement à des personnes comment les satisfaire, soit en les observant et en repérant les difficultés dans leur vie et leurs usages auxquelles vous pourrez mieux remédier en enfilant votre costume de « bon samaritain ».
Les nombreuses techniques qui sont à la disposition du designer dans cette phase sont souvent communes à celles des sciences humaines : anthropologie, sociologie, économie, théorie des organisations, histoire, psychologie, etc.
En partant des constats et des analyses qui ressortent de cette phase exploratoire, la solution n’est pas forcément « fonctionnelle », « interface », « logicielle », « matérielle » ou simplement « humaine », elle demande à être pensée dans sa globalité et réfléchie sous plusieurs angles qu’on peut mettre à l’épreuve de la réalité.
Le meilleur des retours que vous obtiendrez de la réalité sera le « merci » de votre utilisateur (ou de votre client pour les designers).
La boite est cassée, les nuages en sortent
De ce point de départ découleront de nombreux concepts de design ou angles d’expérimentation qu’il faut prioriser selon les attentes et le champ des possibles. Les attentes créent de nombreuses idées qu’il vaut mieux passer au tamis du possible seulement dans un second temps, pour éviter d’être trop vite décourager ou d’exclure une idée qui dans un premier temps apparaîtrait comme « impossible » mais qui s’avérerait plus plausible avec une recherche plus persévérante.
Les méthodes de type « Angel’s advocate » génèrent énormément d’idées et demandent une certaine patience aux esprits trop cartésiens qui voient des miliers d’idées absurdes (comme par exemple: « je convoque Superman pour qu’il expédie mon produit ») se déverser sous leurs yeux avant d’en voir une dont ils diraient « je vous l’avais bien dit ». Mais si vous savez « lire » dans les idées, vous découvrirez soit un nouvel angle, soit une combinaison qui apporte une nouvelle valeur ajoutée.
La logique des « user stories » qui consiste à trouver une expression du besoin entre expression quotidienne et expression technique est à la fois exhaustive et plaisante d’un point de vue rationelle.
L’information est réorganisée
Bien sûr tout idée n’est pas à développer.
La priorisation est fonction :
- des demandes des utilisateurs et de la valeur qu’ils y attachent
- de la faisabilité
- des ressources que vous avez à votre disposition (internes et externes)
C’est une étape très frustrante pour nombre de nos clients qui doivent soit sacrifier des « features », soit les simplifier sans pouvoir aller jusqu’au bout.
Il faut donc que les porteurs de projets se mettent dans une perspective d’amélioration de long terme avec souvent une approche « devops » qui suppose un flux de déliverabilité continue.